Comme on vit, on meurt

Le titre du livre de Pema Chödron reprend un adage populaire pour aborder l’enseignement bouddhiste tibétain inscrit dans le fameux Livre des morts tibétain. Pema Chödron, élève de Chögyam Trungpa Rinpoché, est nonne bouddhiste et dirige l’abbaye bouddhiste de Gampo en Nouvelle Ecosse. Elle a publié de nombreux ouvrages au Courrier du Livre dont Essaie encore, échoue encoure, échoue mieux, qui reprend cette fois une phrase de Samuel Beckett.

Rappelant que le Bouddha a invité chacun à ne pas croire son enseignement sans l’avoir validé par sa propre investigation et expérience, Pema Chödron nous propose de considérer l’enseignement du Bardo Tödrol comme une source de sagesse pour cette vie-là. 

« Le Livre des morts tibétain, nous dit-elle, énumère six bardos : le bardo naturel de cette vie, le bardo du rêve, le bardo de la méditation, le bardo de la mort, le bardo de la dharmata et le bardo du devenir.

En ce moment, nous sommes dans la bardo naturel de cette vie. Comme je continuerai à le souligner tout au long de ce livre, c’est dans le bardo naturel de cette vie que réside notre travail. En parvenant à comprendre que cette vie est un bardo – un état de changement continuel –, nous serons prêts à affronter tous les autres bardos qui peuvent surgir, même s’ils ne nous sont pas familiers. »

De manière très accessible, plus accessible que dans Le Livre des morts tibétain, Pema Chödron nous introduit à cet ensemble d’enseignements en insistant plus particulièrement sur le bardo de la mort, celui de la dharmata, « la vraie nature des phénomènes », celui enfin du devenir. Intégrer la mort dans le flux naturel de la vie favorise le lâcher-prise, l’étendue sans fin de la conscience, la prise en compte de l’interconnexion de toutes choses, le changement continuel, la contemplation de l’impermanence… ce qui permet de réduire ou suspendre la souffrance, née de la séparation, et aussi séparatrice.

La dissolution des apparences, centrale dans le bardo de la mort, est aussi une clé de notre vie au quotidien. C’est ici et maintenant que nous pouvons nous saisir, en chaque expérience, de « l’entre-deux ». A partir d’exemples concrets, Pema Chödron cherche à nous faire comprendre la nature de cet « entre-deux », toujours présent, toujours ouvert, jusqu’à percevoir que « personne ne naît et personne ne meurt ».

Le travail d’introspection, de méditation, d’orientation de l’esprit, mis en œuvre au quotidien, détermine, selon cet enseignement, l’environnement qui nous accueillera après la mort du corps physique. Prendre conscience de nos habitudes, de nos réactions émotionnelles, de nos conditionnements, constitue la base de ce travail. Le premier pas est l’abstention, s’abstenir de toute réaction, nécessairement fruit des conditionnements, pour laisser la place à l’amour et à la compassion. Un changement de paradigme quant aux émotions permet de faire de celles-ci la matière d’une voie d’éveil directe.

Pema Chödron développe avec simplicité les axes principaux du Livre des morts tibétain et la manière de les inscrire dans notre vie quotidienne, non en de grands bouleversements, mais au pas tranquille, afin de se préparer à quatre possibilités : « renaître en tant qu’être humain dans les conditions les plus propices au progrès spirituel », « renaître dans un royaume pur, où l’on peut progresser rapidement sur le chemin », s’éveiller dans le bardo de la dharmata en fusionnant avec les lumières brillantes ou avec la déité », « atteindre l’éveil au moment de la mort en fusionnant la luminosité fille avec la luminosité mère », quatre possibilités présentées dans ce livre.

Source: La Lettre du Crocodile

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