Trésors de la faïence maçonnique française

Après le remarquable ouvrage Franc-maçonnerie et Faïences. Nevers, publié en 2000 grâce à l’inlassable Claude Ghivasky, voici un deuxième ouvrage de référence sur le sujet passionnant de la faïence maçonnique, sujet qui intéresse de plus en plus de monde, fruit de la passion érudite d’un autre spécialiste, Jean-Claude Momal. Jean-Claude Momal remarque d’emblée que les relations entre Franc-maçonnerie et art ne vont pas de soi.

Elles sont tardives et eurent du mal à s’installer malgré l’importance de la Beauté dans la symbolique du Temple maçonnique. Les décors maçonniques sur faïence furent longtemps ignorés et ce n’est que récemment que quelques chercheurs se consacrèrent à une étude systématique dans un domaine qui ne trouvait guère d’intérêt qu’aux yeux des collectionneurs. Jean-Claude Momal salue le travail de ces « amateurs éclairés » sans qui nous ne parlerions pas du sujet. Il repère les obstacles à « une approche raisonnée du sujet » :

« Un premier obstacle tenait à la nature même des objets. Ne relevant qu’indirectement de la pratique maçonnique et de ses rituels, ils étaient au mieux perçus comme des « produits dérivés », davantage du ressort de l’utilitaire. Documents réputés de seconde main, ils ne présentaient pour les chercheurs et historiens, dans le meilleur des cas, qu’un intérêt également second. Autre handicap, l’absence de pôle muséal obédientiel pour les accueillir et les mettre en valeur, qui, les soustrayant au regard, interdisait d’en imaginer même la richesse documentaire, tout en contribuant à en entretenir la dispersion. (…)

Enfin, on n’aura garde d’oublier que l’une des raisons de ce trop long détournement du regard était, pour un large public, l’odeur encore sulfureuse du sujet. Pesait le souvenir de la stigmatisation de la franc-maçonnerie aux heures sombres de notre histoire. Le pillage et la destruction de son patrimoine n’avaient pas que raréfié et dispersé documents et témoignages, ce qui en subsistait hésitait à se découvrir. Seuls affleuraient furtivement de rares « rescapés » se négociant en arrière-boutiques. Ce n’est qu’assez récemment que, les crispations s’effaçant, les restitutions s’opérant et… la spéculation aidant, l’ombre se dissipe et qu’une certaine visibilité se rétablit. »

Après avoir rendu compte de l’évolution du regard porté sur la faïence maçonnique et de la recherche dans le domaine. Jean-Claude Momal présente un inventaire réalisé ses quarante dernières années qui, s’il ne prétend pas à l’exhaustivité, permet d’approcher la richesse et la variété artistiques des pièces répertoriées. Jean-Claude Momal a fait le choix d’une présentation géographique qui témoigne aussi de l’importance de l’activité maçonnique selon les régions de France. Par ailleurs, il rappelle l’objectif de cet ouvrage magnifique :

« Si la faïence a offert un support original et une forme inattendue à l’expression maçonnique, il est moins assuré de l’imaginer susceptible de « faire parler des symboles ». Les offrant d’abord au regard, elle en aura au mieux livré la seule lecture unique de l’inventeur du décor hier, et peut-être convié son lecteur d’aujourd’hui à souhaiter en retrouver le sens. C’est le propos ici, synthétiquement, de s’y essayer sans entrer trop avant dans la complexité des débats théologiques qu’alimente une recherche incessante et féconde, mais du ressort d’autres disciplines. L’objet est d’abord de restituer l’exacte mesure, la richesse, la complexité, et surtout la beauté d’un étonnant ensemble dispersé et ici rassemblé, en le recontextualisant dans le temps et dans l’espace, en lui restituant sa part d’histoire et sa part de sens, en tentant enfin d’en donner les principales clés de lecture. »

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