André Kervella, historien, veut démontrer dans ce livre que la Franc-Maçonnerie fut introduite en France par les Jacobites et l'histoire de cette introduction est l'histoire d'un lieu : le Château-Vieux de Saint-Germain en Laye que Louis XIV laisse à la disposition de Jacques II, de la dynastie des Stuart, qui se réfugie en France après avoir été évincé des trônes d'Angleterre et d'Ecosse.

Nous sommes à la fin du XVIIe siècle. Avec Jacques II, viennent de nombreux Francs-maçons qui vont s'installer durablement à Saint-Germain. La défaite finale des Jacobites va occulter leur importance et leur influence en Angleterre. La piste jacobite des origines de la Franc-maçonnerie française sera ignorée, voilée par une réécriture de l'histoire de l'Angleterre des XVII et XVIIIème siècles au bénéfice des vainqueurs. L'histoire est coutumière de ces faits.
André Kervella en fouillant l'histoire des Jacobites de Saint-Germain nous propose un nouveau récit des origines de la Franc-maçonnerie française et lève aussi le voile sur un pan de l'histoire maçonnique anglaise comme le fait justement remarqué Edward Cop dans la préface de l'ouvrage :
" Mais son livre a également une signification plus large, et s'applique à l'Europe dans son ensemble. Il change complètement notre compréhension du développement de la Franc-maçonnerie en Angleterre entre 1603 et 1688. Il montre en effet comment une branche nouvelle et rivale de la maçonnerie Jacobite émerge durant les années 1690, et comment elle triomphe finalement en créant et en contrôlant la Grande Loge Hanovrienne à Londres en juin 1717, puis en réécrivant à sa manière l'histoire de la Franc-maçonnerie, avec la publication en 1723 du texte fondateur que sont les Constitutions d'Anderson, et en prenant le contrôle de la Grande Loge de France en 1738. L'analyse conduite par André Kervella de ce décalage entre les Jacobites et les Hanovriens, en Angleterre puis en France, permet d'apprécier la signification exacte de la bulle In Eminenti, promulguée en avril 1738 par le pape Clément XII à la demande de Jacques III. Contrairement à ce que l'on a pensé, cette bulle n'est pas dirigée contre toute la Franc-maçonnerie, mais seulement contre sa version Hanovrienne. La Franc-maçonnerie Jacobite était en effet essentiellement, voire exclusivement catholique, tandis que les Hanovriens acceptaient parmi eux non seulement des protestants et des catholiques, mais aussi des non-croyants. A l'époque le cardinal Corsini, neveu du pape, remarque d'ailleurs que c'est seulement la forme Hanovrienne de la Franc-maçonnerie qui mérite d'être condamnée par Rome : la Franc-maçonnerie ancienne pratiquée par les Jacobites était acceptable par l'Eglise catholique.
En 1755, après la disparition du Jacobitisme en tant que mouvement politique, et alors que le gouvernement français n'est plus pro-hanovrien, la Grande Loge de France affirme enfin son catholicisme, et reconnaît formellement les degrés supérieurs du Rite Ecossais Ancien et Accepté. C'est alors que s'installe le malentendu, et l'oubli des origines Jacobites de la Franc-maçonnerie en France. André kervella a enfin su résoudre le mystère. "
Ce faisant, l'auteur tord le coup à ce qui reste du mythe des liens entre maçons " opératifs " et maçons " spéculatifs ". Davantage que la rencontre entre des intellectuels et des tailleurs de pierre par ailleurs symbolistes, nous trouvons à l'origine de l'Ordre maçonnique une lutte entre mouvements politiques. La thèse des origines écossaises n'est pas aussi nouvelle que le dit l'auteur et ne révolutionne pas non plus de manière aussi radicale qu'il le voudrait l'histoire maçonnique. Cependant, ce livre est une véritable contribution à l'histoire maçonnique écossaise.

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