Nous devons à Jean-Claude Dumoncel plusieurs études philosophiques remarquables. Ce petit livre est une introduction à l'Anti-Oedipe de Gilles Deleuze et Félix Guattari dans lequel est exploré les relations entre désir, plaisir et jouissance. Deleuze affirme le désir comme producteur et fait du schizophrène son témoin privilégié.

"La nature est définie par Spinoza comme un être infini , c'est-à-dire une substance composée d'une infinité d'attributs dont chacun exprime une essence éternelle et infinie. La machine dont parle Bergson, c'est un cône posé par la pointe sur un plan posé sur la pointe d'une pyramide animée. Cela donne a fortiori un "homme-machine" bergsonien. Appliquons à ces représentations la méthode géométrique de Spinoza, celle qui prescrit d'étudier toute chose de même que s'il était question de corps, de plans, de lignes et de points.
Tout le système deleuzien est construit sur le paradigme de La Recherche du Temps Perdu comme roman spinoziste : les noms de lieu proustiens ("Balbec", "Venise", etc.) s'expriment dans les lieux (Balbec, Venise, etc.) où se situent les amours successives, de même que les Essences, chez Spinoza, s'expriment dans les Attributs formant la Substance. Et avec le Cône de Bergson, l'objet à double aspect devient un objet à double envergure qui peut se voir soit comme cratère de l'être (contenant "la série des êtres" ou des degrés de tension possibles) soit comme cornet de l'inconscient individuel. Ainsi la mémoire bergsonienne peut-elle, d'un côté, s'égaler (en tant que Mémoire du Monde) à la substance spinoziste (c'est-à-dire à la Nature, et finalement à Dieu) et, de l'autre, se multiplier (sous forme de mémoires personnelles) comme les modes spinozistes (dans leur dissémination sur l'Attribut Pensée).
La méthode ainsi mise en úuvre atteint selon Deleuze l'unité systématique d'une théorie de la Nature et d'une théorie de l'Homme dans l'Univers à mille plateaux : le parallélisme des Attributs (comme l'Étendue et la Pensée) déployé dans la Nature se trouve répercuté par le parallélisme des plans de conscience dans l'Inconscient bergsonien. Que rien de grand dans le monde ne se fasse sans passion ou sans désir, c'est peu. En fait c'est le monde lui-même qui se produit d'après son propre désir selon Deleuze."
Jean-Claude Dumoncel expose la thèse deuleuzienne en enchaînant trois mythes modernes, le mythe des machines célibataires comme vision de la schizophrénie, représenté par le Grand Verre de Marcel Duchamp, le mythe tragique de l'Angélus de Millet comme paradigme de la méthode paranoïa-critique, représenté par l'Oeuf de Salvador Dali, et le mythe individuel du névrosé selon Lacan comme mode d'individuation, représenté par le Cube de Francis Bacon.

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