Le Rituel magique du Sanctum regnum est un texte majeur dans l’œuvre importante d’Eliphas Lévi. Le baron Spedalieri, disciple et héritier de Lévi, fit l’acquisition du manuscrit qui passa entre les mains d’Edward Maitland, d’Anna Kingsford, personnalité remarquable, et fut édité par W. Wynn Westcott (1848-1925), l’une des figures de la Golden Dawn.
Les Editions Amici Librorum ont fait le choix de cette réédition en anglais et en français, deux volumes séparés, en couleur car l’un des grands intérêts de ce livre réside dans les huit superbes illustrations en couleur réalisées par l’auteur et reproduites dans ces pages d’après l’original de 1896. S’ajoutent les XXII Arcanes majeurs du Livre de Toth d’Oswald Wirth publié en 1889 car Eliphas Lévi livre ici une remarquable analyse de ces 22 Arcanes du Tarot.
Dans sa préface, W. Wynn Westcott explique la place du texte dans l’œuvre d’Eliphas Lévi :
« Le lecteur ordinaire, qui n’a pas fait d’étude particulière sur les écrits magiques d’Eliphas Lévi, ni sur la Kabbale, pourrait considérer que, bien que le contenu de nombreux chapitres suivants soit intéressant, le lien entre les Tarots et les détails donnés sous chaque titre est plutôt ténu. Il faut comprendre qu’il existe dans tous les cas une relation directe entre la carte et le sujet ; mais les clés qui les relient sont volontairement absentes par l’intention de l’auteur, bien qu’elles puissent être obtenues par l’étude des autres œuvres de Lévi. »
Toutefois W. Wynn Westcott met en garde contre les correspondances entre les lames du tarot, les nombres et les lettres données par Lévi lui-même dans son Dogme et rituel de la Haute Magie, tout comme dans les écrits de Papus. Ajoutons que les correspondances avancées dans le cadre de la Golden Dawn sont souvent tout aussi erronées.
Le texte d’Eliphas Lévi n’en constitue pas moins un véritable traité initiatique destiné à poser un cadre et à donner une orientation pour la recherche. Chaque commentaire du Tarot d’Eliphas Lévi est largement annoté par Westcott.
Dès les premières pages, Eliphas Lévi délivre un enseignement :
« Un mot est la formule requise d’une pensée, un acte est une manifestation de la volonté. C’est pourquoi la prière est une nécessité, et peut obtenir tout ce qu’elle demande. Une prière est un acte parfait de la volonté, c’est un lien reliant les mots humains à la Volonté divine. Toutes les cérémonies, consécrations, ablutions et sacrifices sont des prières en action, et sont des formules symboliques ; et elles sont les prières les plus puissantes parce qu’elles sont des traductions du mot en action, montrant la volonté et la persistance, étant donné qu’elles exigent une attention plus contrainte que la prière silencieuse, ou la prière exprimée en mots ; et ainsi elles constituent un véritable travail, et un tel travail demande toute l’énergie d’un homme. »
Comme souvent dans l’hermétisme, l’écriture « à rebours » est à l’œuvre, Eliphas Lévi semblant à la fin réfuter tout son essai pour promouvoir un christianisme très formel.
Source : La Lettre du Crocodile