Pascal Gambirasio d’Asseux envisage le Rite Ecossais Rectifié comme un chemin chrétien vers l’intériorité. Si la référence principale est celle de la foi chrétienne la plus « classique », rejetant tout gnosticisme, l’ouverture vers un ésotérisme chrétien, esôterikós, et le recours soutenu à l’hébreu, par la kabbale, lui permet d’éviter un enfermement dogmatique intégral même s’il se veut garant d’une forme d’orthodoxie.
En liant intimement Connaissance et Amour, initiation et mysticisme, deux modalités, il ouvre sur un chemin opératif, exigeant, induit par les rituels au sein du Rite Ecossais Rectifié :
« Dans le christianisme – et c’est l’une de ses spécificités, sa « nouveauté, au sens évangélique précisément, par rapport à l’ensemble des spiritualités traditionnelles – la voie initiatique ne constitue pas une voie spirituelle de nature distincte de la voie de piété et de dévotion ni de la voie mystique (au sens courant du terme) qui est la sublimation de cette dernière, mais « simplement », comme nous l’avons dit, un mode de réalisation particulier : un modus operandi spiritualis. »
Ce chemin d’intériorité n’est sans doute pas éloigné de celui préconisé par Louis-Claude de Saint-Martin, particulièrement quand Pascal Gambirasio d’Asseux cherche à cerner ce qui est pour lui l’ésotérisme :
« On le comprend, ce véritable ésotérisme, en son sens premier et plénier désigne ce qui ne peut être vécu que de et par l’intériorité de l’être ; une connaissance spirituelle au plus intime de soi ; une compréhension intériorisée en étant soi-même au cœur de ce qui est objet de connaissance : une inhabitation (ainsi que s’exprime la théologie) en ce château intérieur aux multiples demeures décrit par Sainte Thérèse d’Avila. »
Le grand intérêt du livre est d’orienter vers les praxis, ce qui manque cruellement de manière générale en Franc-maçonnerie, principalement par la kabbale, ce qui permet de reconnaître et approfondir l’articulation entre Ancien Testament et Nouveau Testament, Ancienne Alliance et Nouvelle Alliance. Le recours à l’hébreu, tout à fait justifié par la référence maçonnique au Temple de Salomon permet d’envisager le RER comme voie du corps de gloire. Le développement proposé à travers les lettres et les nombres permet des perspectives théoriques mais surtout pratiques.
Nous pouvons regretter que Pascal Gambirasio d’Asseux rejette l’une des deux matrices du RER, celle de la doctrine de la réintégration de Martinès de Pasqually, se privant du dialogue, on ne peut plus fécond, entre le référentiel salomonien et le référentiel de la réintégration au grade de Maître Ecossais de Saint-André, clé opérative du rite.
Cependant, il démontre qu’en se limitant à la matrice templariste salomonienne, approfondie par la kabbale, vivifiée par l’ésotérisme chrétien tel qu’il l’envisage, la voie de l’intériorité se déploie jusqu’à la Cité Sainte.
Indépendamment de l’apport historique, nécessaire pour la compréhension du rite, synthétisé dans ce livre, la part la plus importante consiste bien en une « matière » pour celui qui veut envisager réellement le RER comme voie spirituelle dans un processus pédagogique d’une grande cohérence.
« Ce sont, nous dit Pascal Gambirasio d’Asseux, ces réalités spirituelles, ainsi révélées, que chacun est appelé à intégrer en son être même afin d’en faire sa réalité vivante et d’atteindre ce que la tradition chrétienne, en particulier celle d’Orient, nomme si justement la « déification ». Ce sont donc elles que nous présentons ici sous un angle de vue telles, que selon nous, le Rite Ecossais Rectifié les retrace, les assemble et les relie en une véritable « pédagogie spirituelle ». »
En invitant le lecteur vers la pratique du RER comme véhicule d’exercices spirituels, Pascal Gambirasio d’Asseux met en évidence le sens de la « rectification ». Réorienter vers la pratique, au quotidien, découlant de la métaphysique, rend seule la voie vivante.