Le Matras du Maître par Alain Mucchielli

Le troisième volume de cette trilogie exceptionnelle consacrée aux trois grades bleus du Rite Français tient toutes ses promesses. Alain Mucchielli continue son étude en puisant dans la culture alchimique pour mettre en valeur le procès initiatique et fait appel aux subtilités de la langue, grec, latin ou hébreux, pour en chercher les subtilités. Il parle de « kabbale linguistique », « les mots ont une importance depuis très longtemps, dit-il : il ne fait pas les changer sous peine d’en perdre la raison d’être ».

Si ce livre aborde les symboles et les thèmes communs au grade de Maître maçon, il tire son originalité et sa pertinence des différents référentiels utilisés, qui sont autant de filtres, mettant en évidence, comme en photographie, des aspects qui se fondent autrement dans l’environnement sans se révéler.

Il commence par un appel à la transmission sans réserve :

« A nous de voir notre rôle dans la trans-mission. Devenir trans-parent pour trans-mettre intégralement. Et si nous ne comprenons pas, soyons assez lucides pour communiquer in extenso notre patrimoine à ceux qui nous suivent et qui, peut-être, – eux – entendront. La maîtrise, c’est aussi l’humilité… »

Alain Mucchielli explore les mythes de Salomon et d’Hiram, redonne dynamique à des mythèmes figés dans des significations symboliques trop restreintes et rend ainsi au grade sa force initiale. Le référentiel salomonien est présent dès le grade d’Apprenti, mais au grade de Maître, ce référentiel s’épanouit. Salomon est aussi bien un prototype du Maître qu’un prototype du Christ. Il a aussi toutes les caractéristiques de la Pierre, ce qui tisse un lien très intéressant vers les voies du Corps de Gloire qu’Alain Mucchielli approche notamment à travers la question du Cantique des cantiques.

Les différentes figures d’Hiram, en miroir à celles de Salomon, sont aussi prototypes du Maître, du Christ et de la Pierre. Hiram est aussi une incarnation de la voie héroïque. En décortiquant le rituel du grade de Maître, en l’autorisant à livrer tout ce qu’il peut livrer, Alain Mucchielli nous offre une méthodologie. Au lecteur de se l’approprier pour l’expérimenter, l’évaluer et la valider pour lui-même. L’alchimie n’est pas une fin en soi, elle est une ouverture. Il l’illustre par exemple dans un chapitre consacré à la palingénésie :

« Jung nous démontre que les alchimistes, en cherchant les mystères de la matière, ont passé leur vie à se chercher eux-mêmes et nous ont donc légué des outils pour construire notre Temple intérieur, répondre à un désir de synthèse intérieure, d’individuation du Moi que nous avons vue précédemment.

En partant non plus d’expériences maladroites de souffleurs, la piste proposée nous permet de trouver dans la palingénésie et l’homonculus des éléments de notre alchimie intérieure. »

Ce travail, d’une grande richesse, devrait intéresser tout Maître maçon, quel que soit le rite dans lequel il opère. Il renoue avec une exigence du travail maçonnique que de rares loges, tous rites et obédiences confondus, savent maintenir et souvent pour quelques années seulement.

« Il est inutile, dit encore Alain Mucchielli, d’obtenir des grades, ordres et degrés si nous n’avons compris, dès le départ, qu’il est important aussi en Alchimie de toucher physiquement les pierres et les minéraux, d’observer les plantes et les arbres et de comprendre les animaux qui peuplent notre Monde. En d’autres termes, toucher au cœur de Soi, avoir intuition d’un autre-chose, impalpable, indéfinissable avec de simples mots, voire chamanique.

Avoir une vue globale, une vision. Les termes qui signifient « forêt » et « porte » en grec ne diffèrent que par une seule lettre… »

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