Lapidarium Latomorum

Avec ce livre, nous renouons véritablement avec la Tradition, ce qui est rare en une époque où le commentaire noie la pensée. Dès les premiers mots, l’auteur nous rappelle à la discipline de l’arcane :

« Ici, tout est dit, rien n’est écrit. Car trop a été écrit déjà, sans pouvoir dire en vérité. On n’aspire pas ici à faire œuvre pédagogique, mais anagogique. Ce qui est dit l’est donc à tous, mais pas pour tous. Chacun le saura à son tour, pour lui-même. Chacun le recevra à hauteur, et nous y trouverons nourriture solide, si du moins ils savent se passer d’un lait qu’ils trouveront ailleurs en abondance. Ceci n'est pas un manuel, ni un bréviaire ni un catéchisme. Il s’agit moins de dévoiler, que d’aider à révéler, approcher la lumière d’un secret, en respectant l’obscurité où la sagesse des Anciens l’a placée et abritée. »

Un deuxième avertissement salutaire de l’auteur doit être entendu, surtout en ces jours où certains historiens de la Franc-maçonnerie, et plus largement des courants traditionnels et initiatiques, tombent dans la toute-puissance d’une vision étriquée.

« Faut-il rappeler que l’absence de preuve (textuelle) ne saurait être considérée comme preuve d’absence, dans un ordre initiatique encore moins qu’ailleurs. Tout historien conséquent, fût-il positiviste, le sait. Disons également que toute source n’est pas nécessairement textuelle, que la transmission orale, même atrophiée et réduite à un mince fil arachnéen, existe, de même que ceux qui en assurent la perpétuation, loin du tumulte et des lumières trop voyantes des boutiques en vue. Le blason du métier a pu changer, émaux et métaux demeurent. »

Cet ouvrage nous conduit sur les traces d’un secret qui ne peut être révélé mais dont nous pouvons avoir le pressentiment dans le silence. Eugène Hortulain pénètre dans le jardin de l’hermétisme par la porte maçonnique, une porte pré-andersonienne. Il aurait pu tout aussi bien pousser une autre porte tant ce qui importe est le jardin lui-même mais il établit le lien entre Franc-maçonnerie et Alchimie en réévaluant à la hausse les symboles. Il revisite la symbolique maçonnique dans ce qu’elle peut livrer de la trame invisible mais très présente qui la soutient. Davantage qu’un dialogue entre deux référentiels traditionnels il s’agit d’un approfondissement du premier, qui se donne à voir, par le second qui demande à être conquis.

Le recours à l’hébreu tient une place importante dans la parole de l’auteur, importante et indispensable, tant cette langue dit toujours plus que ce que l’auditeur, avant d’être lecteur, perçoit. De quoi, rétablir le rapport initiatique avec les hébraïsmes maçonniques.

« On observe néanmoins, nous dit l’auteur à ce sujet, que les anciens usages maçonniques laissent entrevoir l’existence d’agencements symboliques cohérents avec les données de la tradition hébraïque, ce jusqu’à un degré de détail qui rend le hasard très douteux, sauf à y voir bien sûr l’effet de la propension de tous dualismes généraux ou opposés dialectiques (Soleil-Lune, Mâle-Femelle, etc.) à l’extensivité, assurant in fine leur recoupement mécanique. D’autres observations viennent cependant confirmer que l’on se trouve bien là face à une réalité organique. »

Le Christ et Rabelais habitent ces pages, le premier comme rappel de l’origine et de fin de la Voie, le second comme appelant au voyage initiatique, qui est toujours un voyage de retour et une traversée des formes dualistes.

C’est un livre exigeant et plein d’une beauté qui éveille, tout comme l’œuvre de Louis Cattiaux à qui l’auteur rend hommage.

Ne manquez pas ce « message ».

Source: La lettre du crocodile 

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