L’expérience continue

Le second livre des œuvres de Paul Nougé rassemble des textes divers, poèmes ou essais, brefs ou longs.

L’ensemble fut rassemblé par Paul Nougé avant sa mort en 1967 et cette édition respecte l’organisation qu’il avait donné à ces textes.

Cette œuvre peu connue de l’un est profonde, libertaire, métaphysique et culmine dans le silence. Voici ce qu’en dit Robert Georgin :

« D’où vient cette ignorance qui occulta si longtemps l’œuvre ? Il faut y avoir la volonté expresse de Paul Nougé et l’ultime visée de l’acte surréaliste, pour que la poésie culmine par le silence. Ne nous y trompons pas. Cette démarche est pour une part métaphysique. La bouche muette de Nougé évoque le silence éternel où s’enferme Bouddha, quand enfin l’illumination survient. Quand est franchi le seuil de l’ineffable, rien ne peut plus se dire ni s’écrire. »

« Il suffirait d’abandonner la partie et de se regarder avec bonté. » écrit Paul Nougé.

Si les textes traitent de multiples thèmes, ils sont tous orientés vers l’essentiel, que ce soient des instantanés de vie ou des textes érotiques élaborés. Ils disent l’intensité et l’incandescence du vivant et l’incapacité à saisir ce qui se présente. Pourtant il suffit d’un pas de côté, ou d’un regard légèrement plus attentif :

« Un creux que l’on creuse en plein ciel

à longueur de journée

Un spécieux échafaudage de fil blanc

Un discours cousu des trésors de ce monde

La pierre les seins l’œuf et la chevelure

Le banal cède la place. »

Nous retrouvons les explorations de la langue, de la poésie (Baudelaire), de la peinture (Seurat) chères à Paul Nougé. Toujours, il étonne et détonne, faisant exploser les cadres pour laisser passer la lumière, éclairer les zones d’ombre et voiler les zones trop éblouissantes. Les paysages humains se révèlent sous de nouveaux jours, laissant l’aléatoire offrir des possibilités insoupçonnées.

Paul Nougé ne se laisse jamais embarquer par son sujet. Il conserve cette distance qui permet paradoxalement de se rendre au cœur des choses. Une pensée rare, véhicule d’une discrète métaphysique.

« Aussi naïvement que nous croyons qu’il y a un haut et un bas (et c’est ainsi que le monde existe) nous croyons qu’il y a un avant, un après : c’est pourquoi elle est née qui, en naissant fait de cette croyance une réalité à l’égal de celle du monde. »

 

Source: La Lettre du Crocodile

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