Fragments d’histoire du Compagnonnage

Ce très beau numéro, 17ème de cette série de référence, propose quatre longues contributions : L’arrivée et le départ d’un compagnon par Laurent Bastard – Les couleurs compagnonniques par Jean Philippon – Nouveaux aperçus sur la Sainte-Baume des Compagnons du Devoir par Laurent Bastard – « Voix d’en bas », poètes et chansonniers ouvriers du XIXème siècle par Jean-Marie Moine.

L’étude de Laurent Bastard consacrée aux temps d’arrivée et de départ sur les étapes du tour de France est tout à fait passionnante. Ces moments charnière, « ponctués de rites, qui sont des temps de rencontre, rythme l’alternance entre la ville et les champs, les champs où il n’y a pas de travail et la ville où le compagnon trouve travail mais aussi savoir. « La vie compagnonnique est urbaine » nous rappelle l’auteur.

Laurent Bastard rend compte, à travers des témoignages anciens ou plus récents, des modalités de reconnaissance, de leur diversité, de leur singularité, comme le lave-pieds abandonné depuis longtemps. Il étudie les mécanismes et coutume de l’embauche qui obéit à des réglementations qui diffèrent d’une ville à l’autre jusqu’à la troisième République qui verra s’achever l’uniformisation, ce qui n’exclut pas les usages locaux.

Les départs peuvent être tristes, joyeux, ou encore un mélange des deux selon l’expérience vécue au travail, les relations nouées, la qualité des environnements. Comme les arrivées, les départs connaissent des obligations comme la levée d’acquis et des rites comme la conduite.

Laurent Bastard identifie une structure commune à ces temps forts :

« Ils montrent une structure immuable :

- l’arrivant s’identifie comme compagnon par un rituel secret, celui de la reconnaissance qui est fondamental ;

- il fait de même avec tous ses pays et coteries en ville ;

- il intègre ainsi une communauté où il a des droits et des devoirs clairement définis ;

- le partant ne doit rien laisser dans la ville qu’il quitte, hormis son bon souvenir ;

- il accomplit la procédure symétrique de l’arrivée, en faisant le Devoir avec tous ses pays et coteries lors de la conduite. »

Avec Jean Philippon, nous apprenons le langage visuel et symbolique des rubans, écharpes. La couleur, la manière de les porter, les figures qui au fil de l’histoire se sont ajoutées, les variations selon les sociétés, l’évolution des usages rendent la question très complexe et particulièrement riche. A travers les nombreux exemples et les illustrations proposées, c’est un patrimoine que le lecteur approche.

A la question « Que déterminent les couleurs ? » Jean Philippon répond : « Une société ; Un métier ; Un état (aspirant, affilié, compagnon, compagnon-fini, etc.) ; Une fonction (Premier Compagnon, Premier en Ville, Dignitaire, Président, Secrétaire, etc.) ; Une ville du tour de France ; Le passage ou non à la Sainte-Baume ; une fête (celle de la réception) ; Une vertu ; Une part du légendaire compagnonnique. »

La Sainte-Baume, il en est justement encore question avec Laurent Bastard. Le sujet, si important, déjà traité dans les numéros 7, 12, 14 et 16, trouve dans ce numéro des développements précieux pour, dit-il, « la compréhension des liens plus complexes qu’on ne le pense entre la Sainte-Baume et les compagnons du Devoir. ».

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