Ce roman commence par une citation de Marc Levy : « Ecrire suppose qu’on ne peut pas dire mais que l’on ne peut pas se taire. ». Ce qui sied parfaitement au sujet développé par Jean-Claude Constant, les rapports tortueux à la sexualité qui pollue la vie de l’Eglise, les dénis, les faux-fuyants, les abus cachés…
« Se peut-il que l’Eglise catholique considère ses prêtres comme des hommes de chair et de sang et leur accorde la possibilité de choisir le célibat ou le mariage comme dans d’autres églises chrétiennes ? Pourquoi, dans sa théologie, tant d’ostracisme à l’égard des femmes et des homosexuels ? » interroge Jean-Claude Constant alors même que l’Eglise, aujourd’hui, trop tardivement, sous la direction du Pape François, semble enfin s’approcher de la maturité nécessaire à poser le problème, sinon à le résoudre.
Le roman met en scène un double drame, celui de l’Eglise elle-même, qui se pervertit en niant la sexualité mais en couvrant les dérives, celui d’un individu, un prêtre, confronté à l’omerta qui règne au sein de l’Eglise et qui alimente depuis quelques années les scandales médiatiques.
L’intérêt du roman réside tant dans les grandes questions posées, questions sociétales avant que d’être théologiques, et dans la psychologie des personnages, anti-héros, tendus parfois jusqu’à se rompre entre vérité et mensonge, entre justice et solidarité de corps, entre culpabilité et culpabilisation.
Jean-Claude Constant maîtrise le sujet, enjeux et doutes. Il fut ordonné prêtre en 1971 après cinq années d’études supérieures de théologie. Il est titulaire d’une licence d’Histoire de l’Art et Archéologie, option Egyptologie et d’un Doctorat de 3e cycle, spécialité Littérature et civilisation françaises. Son cursus universitaire, son expérience, ses connaissances se mettent au service d’une écriture simple, belle, vivante, faite de nuances, celles de la vie.
« Un soleil jeune et timide m’accueille sur le perron. Un faisceau de lumière évide les nuées, éclaire la façade d’une luxueuse maison de retraite, La Providence. L’oisiveté m’est secourable. Les rues du quartier Jacques Cœur sont avenantes. Les maisons bourgeoises y rivalisent avec les hôtels particuliers. J’avance la main collée contre le mur, le regard tourné vers les fenêtres à meneaux. Leurs croix latines sont finement sculptées et font saillies. Au-dessus des portes cochères, sur les claies de voûtes des larges baies, les mascarons. Il y a Bacchus, Neptune et Dionysos, les gorgones aussi. Des visages grimaçants pour éloigner le mauvais œil ou chasser les mauvais esprits. Je poursuis la promenade et découvre un bestiaire d’animaux légendaires côtoyant le christ, la vierge, les saints évêques et protecteurs de la ville. Un monde insolite hébergé dans les renfoncements muraux, les niches d’angle, sous les toitures. Un foisonnement d’êtres discrets, de personnages fabuleux qui protègent ou châtient, bénissent ou maudissent. A qui rien n’échappe. C’est comme ça la vie, sous le regard de Dieu, des autres. Du mien, sans concession sur moi-même ni sur les autres. »