Alexandre Safran, ancien grand rabbin de Roumanie est aujourd'hui grand rabbin de Genève.
Son livre, magistral, est consacré à l'essence de la judéïté, à ce qui engendre et constitue, spécifiquement, l'Homme et le Peuple juif. Il tente de cerner la vocation, la mission du Peuple d'Israël à travers ses multiples facettes. Alexandre Safran analyse avec une grande clarté les thèmes essentiels de la pensée religieuse juive. C'est pour le lecteur une approche très riche, rigoureuse et érudite, mais qui reste toujours accessible, des fondements de la Tradition juive : Chabbat et Jérusalem, Juif et Communauté d'Israël, Exil et Retour, Peuple et Pays d'Israël.
"Les lignes de force qui constituent l'économie de la vie intérieure du peuple et du pays d'Israël, les facteurs de vie juive qui agissent ouvertement dans l'histoire du monde, s'appellent : Dieu, Tora, Israël et Erets-Israël (Pays d'Israël).
Ces idées-forces représentent les constantes de l'histoire d'Israël. Elles sont considérées comme telles dans l'authentique tradition religieuse juive, ancienne et moderne, qui, de ce point de vue, est unitaire, tant sur le plan de la pensée que sur celui de l'existence. Nous-mêmes, croyants juifs de notre génération, pouvons en témoigner : ce qui paraît ancien, nous le pensons en termes modernes et le vivons dans l'immédiat ; ce qui paraît moderne, nous le pensons en terme ancien et le revivons dans le passé."
Ce jeu entre ancien et moderne, entre Tradition et avant-garde est un fondement de toute démarche libératrice. Il reste cependant mal appréhendé, voir ignoré par le plus grand nombre. Ce n'est certes pas un hasard s'il est ainsi mis en avant par Alexandre Safran dès les premières lignes de ce livre.
Après avoir développé les thèmes du Peuple et du Pays d'Israël, de l'Exil et de la Rédemption, de Jérusalem, symbolique et opérative, propres à l'intériorité d'Israël, il étudie longuement la question du Temps Juif et du Temps Chabbatique, rappelant que La Tora est un enseignement du juste emploi du temps :
"Le judaïsme se fonde sur une conception particulière du temps qui est un temps chabbatique. L'ordre du temps préside à la Tora - à l'Enseignement divin du judaïsme -, commande et règle la vie du juif, elle-même disposée selon l'ordre de la Tora. La chronologie des mitsvot positives - des prescriptions religieuses - s'insère dans l'ordre du temps ; la transgression des mitsvot négatives - des interdictions religieuses - dérange l'ordre du temps."
Ce point soulève nettement le sens du rituel et sa relation puissante au temps. Elle indique aussi du même coup l'importance d'un non-temps dans la distinction entre rite et cérémonial.
Alexandre Safran en arrive finalement à l'importance du septénaire. Le nombre sept est le nombre élu par Dieu.
"L'Homme messianique, se rapprochant de l'accomplissement du nombre sept, poursuit intensément son affinement (l'oeuvre d'affinement se fait au moins sept fois) ; il poursuit intensément son oeuvre de sublimation, de dépassement, en s'approfondissant lui-même, en s'ouvrant aux autres, en coopérant, avec patience et confiance, avec son Grand Partenaire. [...]
Le Yi'houd, l'unification divine, l'unification des mondes, étant réalisée, par l'action religieuse, éthique, historique, de l'homme, - l'unité totale est rétablie. Dans l'unité, l'homme, l'humanité, et notamment Israël, "le peuple qui sanctifie le septième", fêtent l'unité absolue de Dieu. [...]
L'unité de Dieu est célébrée par la prière, parce qu'elle est elle-même l'aboutissement de la prière chabbatique. Celle-ci repose sur le principe du nombre sept: elle contient "sept prières", tefilat chéva, et tend, à travers ces sept bénédictions, vers l' "unité des bénédictions", vers la "source des bénédictions".[...] Elle [la prière] exprime les cheva hodaot, les "sept actions de grâce", les "sept louanges", qui devront être celles de l'homme à l'égard de son Dieu : l'homme est reconnaissant à son Créateur pour les "sept bénédictions" qu'Il a accordées à son âme lorsqu'il la plaça dans son corps et la chargea d'une mission sur la terre. Les "sept gratitudes", devenues des gratitudes messianiques, sont célébrées sous chéva 'houpot, sous "sept baldaquins nuptiaux", symbole d'une vie procréatrice qui commence, dans l'union joyeuse, cette fois-ci pleinement confiante entre Dieu et l'homme.
La gueoula, la "délivrance" est ainsi réalisée ; le "salut" est ainsi obtenu. La gueoula, sera composée de Chéva gueoulot, de "sept délivrances", à l'instar des "sept délivrances " prodigieuses dont Dieu a fait bénéficier Son peuple, Israël, lors de sa sortie du pays des Pharaons. La délivrance d'Israël de l'esclavage égyptien est célébrée, particulièrement, par Dieu et Israël, pendant les sept jours de fête de Pessa'h. L'union messianique entre Dieu et Israël, pendant les sept jours de fête de Pessa'h. L'union messianique entre Dieu et Israël sera particulièrement célébrée, par le Créateur et Son peuple, par le Roi d'Israël et le peuple d'Israël, durant les "sept jours" de joie, à l'instar des Chivat Yemei HaMitché que célèbrent le fiancé et la fiancée, après avoir été proclamés époux et épouse.
Le nombre sept relie ainsi à tout jamais le Créateur et Sa Création, Dieu et Son peuple : le Chabbat est leur trait d'union."
Nous ne pouvons que vous inciter à étudier ce livre, contribution certaine à la compréhension de la Tradition juive comme de toute Tradition.

texte: Le Crocodile, https://lettreducrocodile.over-blog.net/

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