Edward Geroges Bulwer, Lord Lytton (1803-1873) est resté célèbre dans les milieux initiatiques pour son roman Zanoni Maître Rose-Croix, publié la première fois en 1842 qui traitait notamment de la voie sèche et de la voie humide.
Bulwer-Lytton fut probablement membre d’un cercle initiatique. Nous ignorons lequel. Propulsé malgré lui président d’honneur de la Societas Rosicruciana in Anglia, il protesta énergiquement. La SRIA ne fut pas la seule société à tenter de s’approprier l’auteur de Zanoni. L’AMORC, note Dominique Dubois dans sa préface, en fit un usage très publicitaire. La piste italienne, et peut-être plus précisément napolitaine, semble crédible mais là encore, nous n’avons guère plus que des coïncidences de dates. La carrière initiatique de Bulwer-Lytton reste mystérieuse. Dans une lettre à Hargrave Jennings (1817-1890), il confie : « Il y a des raisons qui m’interdisent d’entrer dans le sujet de la fraternité Rosicrucienne, société qui existe toujours, mais sous aucun des noms permettant à ceux qui n’en font pas partie de la reconnaître. ».
Qui plus est, Fred MacParthy, dans son introduction, rappelle la confusion fréquente entre le père et le fils : « Toutes les théories qui placent Bulwer-Lytton Père au contact avec des Ordres initiatiques maçonniques, néo-rosicruciens, etc., en Allemagne, en France et tout autre lieu d’Europe continentale, ne sont que des confusions entre le père et le fils. »
Bulwer-Lytton contribua, comme Mary Shelley (1797-1851), auteur de Frankenstein, à l’émergence d’un nouveau genre littéraire, le roman fantastique. Tous les deux furent influencés par Lord Byron et bien sûr William Godwin, père de Mary Shelley. Idéaliste en faveur des libertés individuelles, Bulwer-Lytton entra en politique et fut même député ce qui n’empêcha pas une carrière littéraire à succès.
L’auteur de Zanoni et de La race à venir, ne traite pas directement des sociétés initiatiques dans Une étrange histoire mais d’épisodes particuliers de la queste d’un homme. Bulwer-Lytton rencontra Eliphas Lévi en 1854, mais aussi Kenneth Mackenzie et Pascal Beverly Randolph. C’est dans cette mouvance, et influencé par Eliphas Lévi, que se construisit la trame de ce roman autour de la question de la coagulation d’un corps de lumière, Sin Laeca, et de son usage. Une étrange histoire raconte la lutte occulte et intellectuelle entre deux hommes, le Docteur Julius Faber et un magicien noir, Margrave. Faber va assister la victime de Margrave, le Docteur Fenwick.
La dimension sociétale n’est pas absente de cette histoire comme le remarque Dominique Dubois : « En définitive, l’histoire romancée de Bulwer-Lytton, de ce véritable mystique écrivain disait de lui la fondatrice de la Société Théosophique, H.P. Blavatsky (1831-1891), illustre et sur grandeur nature ce que notre actuelle société matérialiste véhicule. Ses valeurs, sous couvert parfois d’une moralité douteuse, nous rappellent à bien des égards Margrave. La minorité de cherchants ne peut que constater la réalité. Impuissante, elle voit ainsi s’abattre, telle une chape de plomb, le poids et l’emprise tentaculaire du pouvoir sous toutes ses formes. En somme, la question du Docteur Fenwick, « Ai-je donc douté que l’âme fût distincte du mental », et sa prise de conscience alarmante, relèvent d’une eschatologie. »
Mais l’intérêt premier de ce livre demeure littéraire. C’est un roman représentatif d’un genre qui aime faire plonger le lecteur dans une étrangeté obscure.
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