L’auteur tente de cerner la personnalité complexe de ce poète bulgare qui écrit en français, pénètre l’espace de la langue française pour y déployer sa poésie contre toutes les formes d’oppression et, surtout, pour toutes les libertés. Recopiant à la main ses fameux « Ecrits inédits » pour qu’ils échappent à la censure totalitaire, Lubomir Guentchev est entré très tôt en résistance, poursuivi par la police et la justice bulgares dès les années 50.

La France, qu’il n’a jamais connue, est pour lui une terre d’asile métaphorique.
Guentchev, le poète, est plus connu que Guentchev dramaturge, homme de théâtre. Pourtant, il semble avoir écrit dès 1954 un drame symboliste, ou néo-symboliste, une Théurgie, qui fut retrouvée dans sa version française en 2001. D’autres pièces, confisquées par la police en 1973, furent retrouvées dans leur version bulgare.
Alain Vuillemin nous rend cet homme proche et malheureusement très actuel. Il le demeurera tant que les champs de la bêtise et de la médiocrité humaines continueront d’être fertiles.
« La Bulgarie a compté au XXème siècle, sans le savoir, au moins un très grand poète bulgare d’expression française. En effet, par l’ampleur de son œuvre, par l’originalité de ses partis pris et par le rôle de véhicule qu’il a joué, sans l’avoir voulu, entre les auteurs symbolistes des pays de l’Est et ceux des pays de l’Ouest, notamment allemands et français, par l’intermédiaire de ses traductions retrouvées, Lubomir Guentchev aura occupé une place paradoxale non seulement dans la littérature bulgare d’expression française mais aussi dans l’histoire des littératures européennes francophones. A ce titre, pour reprendre un commentaire qu’il a avancé lui-même à propos de Théodor Traïanov, l’un des poètes symbolistes bulgares qu’il a traduits et qu’il tenait en une estime très élevée, et qu’on pourrait lui appliquer aussi, Lubomir Guentchev « reste à découvrir, à comprendre, à estimer et même à admirer » pour son courage, sa ténacité et sa passion au service de la poésie malgré les risques, les difficultés, les entraves, les interdictions, l’oubli et le silence. »
Il s’en est fallu de peu que nous ne connaissions jamais les écrits de Lubomir Guentchev. Lire Guentchev aujourd’hui, c’est donc traverser l’opacité de l’obscurantisme pour pénétrer délibérément dans le cercle lumineux d’une libre et fragile volonté humaine.

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