L’alchimie des Francs-maçons

Ce très beau livre n’est pas seulement intéressant, il est important, à l’heure où nombre de Francs-maçons cherchent vainement les opérativités pourtant inscrites en creux, parfois en évidence, dans les rites maçonniques afin de répondre à la question très concrète : comment puis-je réaliser la promesse de réalisation énoncée de manière plus ou moins maquée selon les rites par l’Ordre maçonnique ?

Dominique Jardin donne des pistes de réponse en étudiant les liens entre Franc-maçonnerie et alchimie. Si certains hauts-grades font explicitement référence à l’alchimie, c’est sur les grades bleus que se porte le regard de Dominique Jardin selon une méthodologie précise :

« Plutôt que de noyer, comme le font trop souvent les auteurs maçons, les emprunts à l’alchimie dans ce qu’ils nomment la « tradition », sans en repérer précisément les occurrences et les sources, donc en l’essentialisant, nous nous attachons dans cette étude à croiser images et rituels maçonniques avec les textes et gravures alchimiques en tenant compte de leurs spécificités, de leurs datations et références précises. Ce n’est pas parce qu’un rituel maçonnique évoque les quatre éléments qu’il se transforme en texte alchimique : il demeure un texte maçonnique qui emprunte parfois à l’alchimie ou à ses métaphores. »

 

La démarche est donc prudente et permet de comprendre que les greffes alchimiques sur la Franc-maçonnerie bleue apparaissent au XIXème siècle sous l’influence des hauts-grades. Elles ne vont pas de soi. En dégageant un ensemble significatif de correspondances symboliques et alchimiques entre le champ maçonnique et le champ alchimique, Dominique Jardin interroge également le sens d’une éventuelle « alchimisation » des rituels, ou d’une « ésotérisation » du discours maçonnique, ou encore, presqu’à l’inverse, de la dissimulation d’un discours religieux ou parareligieux derrière une présentation ésotérique. Le livre rend compte, de manière approfondie des diverses utilisations de l’alchimie dans les rituels maçonniques dans des contextes historiques variables. Il distingue les thèmes croisés par l’alchimie et la Franc-maçonnerie, puis repère les références alchimiques possibles dans les grades bleus, particulièrement dans la légende d’Hiram qui se prête tout particulièrement à une lecture alchimique.

Nous attirons l’attention sur la partie intitulée « Hiram, l’alchimie et le RER ». Partant, à raison, des écrits de Martinès de Pasqually, Dominique Jardin montre que le rejet a priori de l’alchimie dans le RER est moins fondé qu’on ne le croit généralement et que, tout au contraire, il permet de résoudre certaines questions posées par la mise en œuvre du principe de la réintégration, notamment au quatrième grade.

Également, nous apprécierons les références à deux textes fondamentaux, trop ignorés de F.-N. Noël, La Physique du maçon (1812) et L’Alchymie du maçon (1813) qui constituent un corpus inestimable.

L’iconographie en couleur et la belle présentation réalisée par l’éditeur, ajoutées à un écrit très référencé et éclairant, font de ce livre un outil de référence dans le domaine.

 

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