Le Baphomet, figure de l’ésotérisme templier et de la franc-maçonnerie ?
"Les mythes ont cette formidable capacité : nous obliger à réinterpréter notre époque et nous faire comprendre notre Temps" nous-confie Spartakus FreeMann, praticien de l’ésotérisme bien connu de la blogosphère. La figure du Baphomet aurait-elle donc cette faculté de traverser les époques, à l’instar des mythes ou des archétypes, de descendre périodiquement dans notre monde, et de se draper d’un voile qui correspondrait précisément à l’esprit de notre temps ?
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Pour répondre à cette question, mais aussi analyser avec précision les différentes composantes de ce symbole sulfureux, nous avons réuni à l’occasion de la sortie du livre "Le Baphomet, figure de l’ésotérisme templier et de la franc-maçonnerie" (Ed. Alliance Magique, 2015) un historien spécialiste de ces questions, Jean-Pierre Laurant (EPHE, Politica Hermetica) et son auteur, Spartakus FreeMann.
La rencontre d’un historien et d’un occultiste contemporain
Le philosophe René Girard (+2015) avait théorisé que la constitution d’un groupe, d’un Etat, se consolidait bien souvent au détriment d’un autre groupe : sa théorie du bouc-émissaire.
Au XIIIème siècle, "l’Etat français" alors embryonnaire, a ainsi posé sa première clef de sol en exterminant les Cathares, ces "bons hommes". Un siècle plus tard ce fut au tour des Templiers, ces "pauvres chevaliers du Christ", de faire les frais de cette partition implacable (satanique selon nous), et qui préfigurait ce penchant autoritaire, centralisé, que la modernité allait par la suite amplement illustrer. Dans le procès des Templiers, exclusivement instruit à charge, un emblème mineur, usité quelque fois vraisemblablement en Provence, cristallisa les phantasmes des inquisiteurs : la figure du Baphomet. Ode à Satan ? Les deux Saint-Jean réunis? Luxure ? Homosexualité ? Aucun élément ne pût stopper les bûchers et un nuage de mystère enveloppa alors cette figure du Baphomet….
Cinq siècles plus tard : Friedrich Nicolai (1783) puis Eliphas Lévi (1854) exhument ce symbole
Comment expliquer un telle perdurance ? "En décapitant Louis XVI, en 1793, les franc-maçons ont vengé la mémoire de Jacques de Molay et par là-même accompli la prophétie qu’il lança sur son bûcher… Les franc-maçons sont donc les continuateurs de l’Ordre du Temple et donc, comme eux, ils idolâtrent Satan !". La phrase précédente causerait un haut le cœur à tout historien sérieux, tant elle est chargée d’anachronismes et d’inexactitudes, bref de bêtise crasse. Il n’empêche, au XXIème siècle, et notamment à cause d’Internet, beaucoup d’hurluberlus en quête de notoriété bon marché continuent à affirmer ces inepties. Si, contrairement à ces freluquets de la pensée, nous ne vous rangez pas du côté des Joseph Goebbels qui affirmaient "que plus un mensonge est gros, plus il a de chance d’être cru" : cet entretien vous permettra sans doute de démêler le vrai du faux sur ce symbole épineux, et passionnant, qui préoccupe depuis sept siècles notre nation!