Les Bardos ou états intermédiaires de vie

Y a-t-il une vie après la mort ? Cette question est devenue si familière de nos jours que Pierre Rabhi y fait référence actuellement en objectant "y a-t-il une vie avant la mort"? Derrière cette boutade se cache pourtant une vérité bien plus profonde, voire même fondamentale, et que notre monde "moderne" tend à occulter…. Philippe Cornu, enseignant en histoire des religions et spécialiste du bouddhisme, tantrique en particulier, nous le rappelle dans cet entretien, autour de sa récente traduction, et réinterprétation, du Bardo-Thödol, paru en France sous le titre "Le Livre des Morts Tibétain".

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50:09
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Traduire, c’est trahir affirment certains… Certes, modifiée par Walter Evans-Wentz (qui diffusa ce livre en occident en 1827) et à sa suite mal interprétée par Jung qui ne disposait que de cette traduction et ignorait donc la tradition orale indispensable à sa compréhension, elle fut dévoyée ensuite dans des usages psychédéliques (cf. Timothy Leary) ou de développement personnel… Que subsistait-il in fine de l’original ? C’est donc avant tout un désir de rendre justice au texte et à la pensée des Anciens qui a motivé Philippe Cornu, et une envie de redonner à l’ouvrage tout son sens et sa portée. Une démarche bienvenue dans une société anxieusement affairée à escamoter la vieillesse et la mort, en prônant d’une manière imbécile et illusoire cette vie sans mort.
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Littéralement, Bardo-Thödol signifie « Grande Libération par l’Ecoute dans les Etats Intermédiaires ». Premier paradoxe ici : si la perspective de renaître après la mort peut sembler enviable et porteuse d’espoir pour l’esprit occidental (cf. la théosophie), le bouddhiste cherche au contraire à s’en libérer… Second paradoxe: le karma, ou principe de causalité, implique une continuité entre la cause et l’effet, mais également une discontinuité, puisque toute forme manifestée doit inéluctablement changer, décliner et disparaître : bref, seul le changement est permanent. Or, comment penser une continuité face à la discontinuité dont la mort physique représente cette interruption radicale, du moins sur un plan manifesté ?
C’est ce qui a été théorisé par les disciples du Bouddha après sa disparition. La notion des Bardo est elle-même originaire de l’Inde, où elle vit le jour vers le Ier siècle de notre ère sous le nom d’Antarabava (littéralement : "entre-devenirs"). Les premiers textes qui en parlent sont les Abhidharmas. Différentes voies furent élaborées à sa suite, tel le Mahayana qui apporte quelques changements à la théorie initiale. Le Tantra en est un prolongement essentiellement pratique, ou encore le Dzogchen qui "commence là où les autres voies s’arrêtent". Tout cet enseignement a pour but de familiariser le pratiquant avec la nature fondamentale de l’esprit, qui est « claire lumière », de sorte qu’il puisse la reconnaître au moment de sa mort, et redevenir un "fils qui se réfugie dans le giron de sa mère".
Si l’idée de se préparer à mourir n’est pas nouvelle (cf. Platon ou Montaigne), elle est abordée ici de façon très concrète – à l’instar d’un Antonin Artaud qui nommait le Bardo-Thödol "manuel de délivrance"…. Si, comme lui, vous souhaiez vous familiariser sur ces états intermédiaires, suivez Philippe Cornu dans cet entretien de 50 mn, animé par Françoise Bonardel.

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