Occultation de l’art, énigmatisation de l’objet

Deux brefs préambules : une « chose » existe par elle-même, sans interaction spécifique avec son environnent. Son étymologie vient de « res », en latin, et donne « réifier », en français : chosifier, et, par extension, rendre uniforme, inerte. Le terme « objet », en revanche, présuppose un regard extérieur, une attention particulière, celle du sujet. Un sujet doué conscience et pourvu d’une intention. Cette interaction sujet-objet constitue un pilier dans les sciences humaines contemporaines (philosophie, psychologie) mais aussi dans les arts.

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46:17
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Une direction que nous invite à emprunter Jean-François Chevrier. Celle où un banal objet du quotidien peut se transformer en « énigme poétique », en « fétiche ». Où l’aplat d’un naturalisme mono-sémantique se déploie en des dimensions plurielles dans lesquelles « vie intérieure », « monde du rêve » et « inconscient » deviennent les guides spécialisés.

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Une image est juste parce qu’elle tient au réseau d’analogies qui lit des réalités distantes apparemment très éloignées les unes des autres, l’image procède d’une énigmatisation (André Breton)

En 1930, dans le second manifeste du surréalisme, André Breton exhortait les surréalistes à, dorénavant, occulter leurs travaux. Une occultation revendiquée donc, mais qui ne signifiait en rien d'arrêter toute activité. Trente-et-un ans plus tard, Marcel Duchamp proclamait : « le grand artiste de demain sera clandestin (underground) ».

Jean-François Chevrier, à travers les œuvres et correspondances de René Magritte et Marcel Duchamp évoque ici les conséquences à la fois culturelles et politiques de cette occultation. Il place ensuite cette clandestinité en regard d’une énigmatisation de l’objet dont les surréalistes se sont fait la spécialité. René Magritte en tête, puis, à sa suite Marcel Broodthaers, pour rester dans le landerneau belge.

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« Réification de l’Homme », « culte de l’objet », « fétichisme de la marchandise » : des mises en gardes cinglantes, d’inspiration marxiste.

Entre le mouvement artistique munichois der blaue Reiter (1912) et le Pop Art américain (1960), l’Occident a connu un nombre inouï de mutations. Qu’en est-il de l’art et de cette vivifiante interaction sujet-objet ?

Si Marcel Duchamp dénonçait déjà à son époque « un art sombrant dans un exotérisme hypertrophié, c’est-à-dire un art défini par des critères extérieurs, étranglé par une pression commerciale trop forte et une attente excessive du public » quel constat établirait-il aujourd’hui ?

Où retrouve-ton « ce contact avec le mystère » qu’entretenaient tous les artistes de cette époque et dont on peut ajouter les noms de Kandinsky, de Chirico et Mondrian ?

Exposé enregistré lors du 37e colloque international de Politica Hermetica que nous remercions.

Titre original de l'exposé : Occultation de l’art, énigmatisation de l’objet : « le contact avec la réalité rend toujours malade ».

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