Jacques Castermane ou la sagesse du corps

Jacques Castermane fut longtemps le disciple de Karlfried Graf Dürckheim auquel il consacra un ouvrage, Le centre de l’être, publié chez Albin Michel en 1992. René Monami pratique le zen auprès de lui depuis de longues années. Ce qui caractérise ces trois personnalités d’un même courant est la capacité de théoriser à partir de la pratique et de la clinique.

Ce livre est basé sur des échanges et conversations avec Jacques Castermane à l’occasion de sesshin ou de retraites. Au cœur des propos se trouvent la question de la « déségocentration », de l’attention, de la conscience avec objet ou de la conscience sans objet. Chaque partie du livre est indépendante et renvoie à la pratique elle-même. De manière forte, la première partie s’intitule Un itinéraire sans itinéraire.

« Le terme d’itinéraire, nous dit-il, désigne une route, un chemin à suivre, il renvoie à un parcours, un voyage, une voie à suivre, or J. Castermane nous répète qu’il n’y a pas un chemin à suivre, mais un chemin à tracer. « Un pas, une vie », en quoi consiste une biographie, quels sont les éléments saillant du parcours d’un être, de l’itinéraire de J. Castermane ? Lorsque je lui pose la question en entretien, il me répond inlassablement : « Maintenant, je suis assis ici ! ». »

Témoignages, paroles, anecdotes, histoires traditionnelles rassemblées dans ces pages, tout en se gardant du langage, permettent à René Monami de ramener le lecteur attentif au corps et, par le corps, à sa véritable nature. « Quand vous respirez, qui respire ? » demande-t-il.

Après une présentation du Centre Dürckheim, la troisième partie, la plus conséquente, introduit à l’enseignement, « un enseignement jamais fixé » :

« L’enseignement ! Une dénomination donnée à cette voie de transformation, nous dit J. Castermane, qui légitime d’accompagner des personnes intéressées par le « chemin à tracer ». Si ce chemin a un but, ce serait de passer de l’adulte à l’homme mûr. »

Comme Graf Dürckheim, J. Castermane ne veut pas de formation ni d’apprentissage, plutôt une maturation. Le mot même d’enseignement est trompeur, il s’agit de la recherche permanente, sans cesse renouvelée, d’une attitude juste et de la simplicité.

« La pratique et les enseignements au Centre portent une attention particulière à ce que Graf Dürckheim appelait la tenue et la forme juste, insiste René Monami, Tenue et forme qui ne cessent de s’organiser et se réaliser dans notre quotidien, d’instant en instant. »

Le livre, inhabituel dans sa construction, rappelle le lecteur, pratiquant, à lui-même. Davantage que la parole, c’est le corps qui enseigne. René Monami cite J. Castermane :

« Il faut savoir que tout cela est très simple. Le Maître enseigne ce qu’on appelle la sagesse (le calme, la sérénité, un état d’être confiant) à travers sa manière d’être en tant que corps vivant. Je ne peux oublier ma rencontre avec Graf Dürckheim, à Bruxelles en 1967. Le visible ! C’était sa manière d’être debout, assis, de marcher. L’invisible ? Il était en contact avec sa vraie nature, sa nature essentielle. »

L’ouvrage est une incitation à la pratique, une pratique sans attente, sans projection, libre, fluide… « Laisser couler ».

Source: La lettre du crocodile 

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