L’énigme de ma vie. Vers un développement impersonnel

Ce livre est le fruit d’une rencontre et d’entretiens conduits par Sarah Hirschmuller auprès de Luc Bigé. Sarah Hirschmuller a perçu, derrière l’apparence protéiforme de l’œuvre de Luc Bigé, qui a investi de nombreuses disciplines, une autre manière de faire sens ou de saisir le sens, une recherche du « sens même du sens », un méta-sens peut-être.

C’est en considérant la vie de chacun, la sienne d’abord, et la vie en générale, comme une énigme, que ces entretiens ont été menés. « C’est un bon point de départ » reconnaît Luc Bigé, « Mais dès lors qu’on envisage sincèrement sa vie comme une énigme, on se connecte à son mystère. Le mystère que je suis pour moi-même, si je le reconnais et si je m’ouvre à lui, me relie immédiatement au grand mystère de la vie, auquel je deviens tout à coup étrangement disponible. Mes représentations tombent – du moins les plus inutiles d’entre elles, et certainement les moins utiles à la vie. Quelque chose se dénoue, se désencombre et devient soudainement simple. »

Ce passage du complexe au simple est aussi chemin du personnel à l’impersonnel, du duel au non-duel. L’ouvrage débute avec la question du désir, des désirs, et du cortège d’illusions et de souffrances qui les accompagnent. Luc Bigé évoque une autre forme de désir associé à la transcendance et au « murmure du Soi », et aussi à la reconnaissance, difficile, de « notre fragilité ontologique ».

Le sens du mystère qui nous conduit à la reconnaissance de notre propre nature est souvent perdu de vue, masqué par nos accumulations, le jeu du faire et de l’avoir. A travers des questionnements très communs, des expériences partagées, l’incertitude, le service, l’amour, la bonté, l’intuition… Luc Bigé nous réoriente vers cette permanence, cette essence qui nous constitue et que nous ignorons, ou faisons mine d’ignorer, trop souvent.

Mais sont abordés des questions plus générales qui pourtant nous déterminent comme le capitalisme ou l’espèce, notre espèce :

« L’humanisation n’est pas terminée. Notre espèce a, quoi, 300000 ans d’histoire ? L’humain est encore, pour une grande part, un animal. Il a, comme les animaux, un besoin de territoire physique, avec une maison à soi et tout ça, un jardin, des terres… mais aussi, par extension, un territoire social, professionnel par exemple. La défense du territoire est ce qui caractérise le monde animal, le cerveau reptilien est adapté à ça. Ensuite, il a aussi énormément besoin de liberté extérieure : on n’enferme pas un animal sauvage ! L’homme n’a pas trouvé encore la liberté intérieure. Enfin, il se cherche beaucoup dans le pouvoir, le rapport de force, la domination. Il n’a pas encore appris à servir ce qui est plus grand que lui en lui. »

Pour l’émergence d’une « société de compassion », Luc Bigé nous invite à nous ouvrir à la transcendance comme à l’immanence, à la métamorphose et à l’immensité. « Comprendre, aimer, transformer » est un processus mais c’est le défaut de compréhension qui nous pénalise. Comprendre implique d’abord d’accepter ce qu’offre le fini, en toutes ses expressions, parfois brutales, pour les transformer. Passer du point de vue personnel, limité, au point de vue de l’univers, impersonnel, illimité, c’est plonger consciemment dans le « jeu de la Vie ».

« Et c’est une joie, insiste Luc Bigé. C’est la joie de la danse de l’univers qui se manifeste par le mouvement permanent : les atomes dansent, les planètes dansent, la terre tourne autour du soleil, qui tourne autour du centre de la galaxie… Tout cela est une grande danse – ce que l’on appelle dans l’hindouisme, la « grande Lilâ divine », la manifestation de la vie, le principe du mouvement. »

Source: La lettre du crocodile 

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