Cet essai, magnifiquement illustré par des estampes japonaises, est consacré à la figure à la fois haute en couleur et toute en intériorités et en subtilités du samouraï au fil du temps traditionnel du Japon.

L’auteur retrace l’histoire du samouraï, la place centrale qu’il occupa dans la société féodale jusqu’à son déclin et, simultanément, touche par touche, éclaire les principes, les fondements du bushido, de la voie du guerrier. Sept siècles durant, les samouraïs constituèrent une élite qui domina le Japon, caractérisée par une liberté d’esprit qui pouvait aller jusqu’au choix du suicide rituel, malgré l’apparent carcan éthique. L’éthique et la sagesse du bushido débordèrent le cadre de la pratique du sabre pour imprégner d’autres arts, la calligraphie, l’art du thé, l’ikebana ou encore le jeu de go, importé de Chine que les samouraïs considéraient comme une discipline à part entière.
La culture de la mort, de la mort sacrée, autour d’un code d’honneur difficilement compréhensible pour l’occidental, a marqué considérablement l’histoire du Japon jusqu’au deuxième conflit mondial et l’épisode tragique des kamikazes Cette culture imprègne toujours, sous d’autres formes, l’esprit des japonais du XXIème siècle. Le bushido a traversé le XXème siècle chaotique. Il est toujours vivant.
« Nitobe, nous explique Aude Fieschi, était issu d’une famille de samouraïs et il en avait reçu l’éducation. Mais en voulant expliquer l’âme japonaise aux étrangers, il n’avait pas toujours su éviter l’emploi de stéréotypes et une certaine généralisation. Pouvait-il en effet prétendre que le bushidô était l’âme du Japon tout entier alors que ceux qui avaient été élevés dans ces préceptes ne représentaient qu’une toute petite frange de la société ? Pourtant Bushido, the soul of Japan fut traduit en japonais quelques années après sa parution en anglais et eut beaucoup de succès au Japon. Il a sans doute influencé l’idée que le Japon se faisait de lui-même et mené par la suite à une forme de « samouraïsation » de la société japonaise. La formation d’un Etat-nation implique un besoin de légitimité et demande que ses membres se reconnaissent dans certains traits communs qu’il fallait définir : Le Japon serait une nation de nobles guerriers, tous servant l’empereur avec la vieille et spécifique notion de loyauté et l’antique rigidité. Cette caractéristique de l’ère moderne est souvent oubliée, mais est essentielle. Alors que le Japon était occupé à s’occidentaliser, il était en train de se « samouraïser » activement.
Hirobumi Ito, premier ministre japonais dans les années 1880, allait aussi y travailler :
Notre tâche principale aujourd’hui est d’inculquer à la population entière l’esprit de loyauté, de dévotion et d’héroïsme qui était auparavant associé à la classe des samouraïs, et de faire siennes ces valeurs. Aussi devons-nous apprendre aux gens à travailler et à étudier dur pour le bien de leur voisinage et de leur village, et à ne jamais s’aventurer dans des affaires qui mèneraient à la destruction de leur famille. Par ailleurs, ils doivent développer un caractère pacifique et obéissant, montrer du respect pour les lois et se montrer capables de comprendre nos nobles idéaux et le haut raffinement de nos sentiments nationaux.
Et c’est ainsi que le gouvernement allait appliquer à toute la nation japonaise le « masque du samouraï ». »
Aude Fieschi nous livre donc un bel essai qui permet d’approcher avec finesse la société traditionnelle japonaise et ses prolongements actuels.

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