Les lutineries. A la rencontre des lutins de France

Voici un livre merveilleux et indispensable en ces temps où notre rapport à la nature se dissout dans les nuages numériques. « Où sont passés les lutins ? interrogent les auteurs, Ceux qui gambadaient dans les pages des livres ou les mots des conteurs. Ceux qui vivaient encore, il n’y a pas si longtemps, à quelques pas des mortels. Cohabitation souvent douloureuse qui, par l’inconstance de la nature profonde de nos petits êtres, rendait les relations humano-lutines difficiles.

Tel un Janus non plus mythologique mais féérique, il passait de la bienveillance à la cruauté en un clignement de paupières. Où sont passés les lutins ? »

Kerloc’h et Hervé Thiry-Duval nous emmènent en quête du petit peuple :

« Pourtant, le petit peuple, devenu un écho des contes d’autrefois, se révèle toujours là. Mais il faut savoir le respecter, l’apprivoiser, le rassurer, pour espérer un jour l’apercevoir. Lors d’une balade en forêt, observez tous les petits signes qu’ils aiment à laisser derrière eux, comme autant de messages vaporeux qui nous sont destinés (…) Observez, écoutez, patientez et vous les trouverez. Mais avant tout, en tournant les pages de ce livre, apprenez à les connaître pour ensuite les aimer, ils vous le rendront au centuple. »

La quête commence par une carte de France lutine, une manière de constater qu’ils sont partout, ou presque, comme le révèle d’ailleurs la toponymie. Elle se poursuit par un souci de distinction. Les auteurs notent que nous avons tendance à nier leur diversité et leur spécificité.

Il y a bien sûr les Farfadets, dont l’origine est incertaine. Troglodytes venus de l’Ouest, ils se distinguent en Fadets, Frères-Fadets, Fras ou Fradets. « On les décrit généralement comme des êtres très velus, un peu crasseux, toujours mal fagotés ». Ils aiment faire des trous, creuser la terre, avec leurs mains de taupe et nous apprenons qu’ils préfèrent les blondes et veillent sur des trésors.

Il y a le Teuz, un lutin des eaux douces, breton, qui fut proche de l’homme, trop proche, ce qui déclencha une guerre avec les Korrigans.

Il y a le Drac, le ricaneur malfaisant du Quercy, dont le nom évoque par l’étymologie le dragon, voire le diable. Spécialiste des mauvais tours et de l’art de la métamorphose, il recherche les milieux aquatiques. On dit que des adolescents peuvent devenir disciples du Drac, surtout en période de Carnaval, on dit qu’ils « font le drac ».

Il y a le Nuton qui habite les Ardennes, belges et françaises. Lutin des cavernes, travailleur, il est un maître des arts manuels. Les Nutons sont mineurs, forgerons, bourreliers, chaudronniers, menuisiers, etc. Ils rendaient service aux humains jusqu’à la deuxième guerre mondiale. Depuis, ils ont disparu dans les profondeurs de la terre.

Ce livre vous fera découvrir ou redécouvrir aussi les Morgans de l’Île d’Ouessant, le Tac des forêts landaises, les Afars du Haut-Vivarais, le Goubelin normand, les Sarvins, farceurs de Haute-Savoie, le Fullettu corse, les Foultots du pays Comtois, le Lamina des montagnes Basques, le Sotré des Vosges, l’étrange Matagot, un chat d’argent de Gascogne…

Et comme le suggèrent les auteurs, il faut être particulièrement sot pour ne pas croire aux lutins. Si les lutins se replient aujourd’hui loin des êtres humains, la raison première en est évidente. Notre rapport destructif avec la nature les met bien évidemment en danger. Seul le Matagot s’est rapproché, entrant dans nos maisons, dissimulé parmi nos compagnons de fortune, les chats. Adoptons comme devise, la forte affirmation d’Hervé Thiry-Duval : « La féérie vaincra ! ».

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