Miscellanées tantriques de Jean Papin

Le tantra est vivant et spontané. Il s’affranchit des formes y compris des formes traditionnelles. Par cet ouvrage qui rassemble des entretiens, des causeries dans un dialogue entre textes traditionnels et actualités scientifiques, Jean Papin veut dissoudre les croyances figées qui nuisent à la spontanéité et l’imprévisibilité de la voie. Le premier entretien traite d’ailleurs de la kundalini, occasion pour Jean Papin de balayer préjugés, présupposés inutiles et confusions variées mais tenaces.

Il met en garde contre la méditation de symboles qui se pensent mais ne se méditent pas et invite à la sensation, à l’expérience directe de ce qui se présente, comme dans l’approche Trika notamment. Il invite au simple plutôt qu’à l’adoration de la complexité. Toucher plutôt que représenter.

« A la fin le toucher réunit tout, et c’est ce qu’on appelle le toucher holistique. C’est le toucher de l’énergie, le toucher de la connaissance, qui vous met en accord parfait, en osmose avec le tout. Et vous avez senti, vous voyez les lignes de lumières qui s’entrecroisent, vous en faites partie, ça vous traverse, vous êtes dans la trame, et vous le savez. Alors que l’état de l’homme ordinaire, c’est qu’il ne le sait pas. C’est tout. »

Jean Papin commente certains passages de textes fondamentaux comme le Vijñāna Bhairava Tantra afin d’établir un rapport renouvelé et plus profond au son, ne pas se laisser saisir par l’esthétique, pour être attentif au prolongement du son, à son étirement. « Si l’esprit ne s’intéresse à rien d’autre, à la fin de chaque son, on s’identifiera à la forme merveilleuse du firmament suprême. » dit le sloka 41 du Vijñāna Bhairava Tantra. Cette entrée dans le jeu de l’énergie et de la conscience par le son est privilégiée par Jean Papin. A travers le son et les rāga se dessine un chemin vers le spanda, la vibration ultime. Il s’agit toujours d’abolir la distance maintenue entre l’objet et le sujet par l’inattendu, l’intuition directe, la grâce, entendue comme « l’énergie qui vous tombe dessus », tout ce qui rompt finalement la continuité du voile opaque de la conscience. Nous sommes là proches du Tantrāloka d’Abhinavagupta.

Kundalini, Kali-Yuga, reconnaissance du cœur, conscience et états de conscience, remontée des tattva, déclin, mort et renouveau, voici le fil de l’ouvrage respectant la chronologie des rencontres et entretiens. Les propos sont bien entendus beaucoup plus imbriqués pour rendre compte du tissage de la réalité. Au fil des pages, la métaphysique vient prendre appui sur les orientations pratiques sans que la singularité totale de l’instant ne soit affectée. Jean Papin a toujours le souci d’une inclusivité totale. Laisser quoi que ce soit « au dehors », ne pas s’extraire totalement du langage sans le rejeter, sortir de l’ordinaire sans le réintégrer, maintiennent dans l’illusion, une illusion tangible de dualité.

« Si tu ne vas pas jusqu’au bout, si tu ne réalises pas en même temps l’immanence des choses, tu restes dans le contentement d’une transcendance qui n’est pas satisfaisante, parce qu’elle n’englobe pas toutes les choses, elle n’est pas complète. » Le chemin de retour au vide « notre pays natal » est présenté de bien des manières d’une tradition à une autre, d’un enseignant à un autre.

Jean Papin veille à ce que l’on ne puisse pas s’identifier à son propos et ne cesse de nous renvoyer à notre propre expérience par un questionnement permanent.

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