L’Ordre du Temple Solaire (O.T.S.), un drame initiatique

C’est le titre d’une étude très rigoureuse et intéressante de l’historien David Frapet, publié dans le n° 415-416 de la revue de l’AEIMR, Mouvements Religieux, dirigée par Bernard Blandre, qui revient sur la genèse, les composés et les processus du drame qui a agité la France et l’Europe à partir de la découverte, le 4 octobre 1994, par la police canadienne, de deux cadavres calcinés dans un chalet de Morin Heights, début d’une effroyable hécatombe.

  Contrairement à d’autres auteurs, parfois auto-proclamés « spécialistes », qui ont écrit sur le drame, David Frapet évite les thèses fantasmées autour de l’extrémisme, des liens supposés avec les services secrets, les Mafias, ou autres. Il montre que, à la croisée d’héritages divers, dont celui de l’Ordre Souverain du Temple Solaire et de l’Ordre Rénové du Temple, la doctrine de l’OTS est syncrétique, comme celle de nombre d’ordres ésotériques, mais incapable de synthèse. L’auteur reprend dans le détail toute la genèse du néo-templarisme depuis les années 1960 avant de poser la question de la dérive de l’OTS :

  « Certes, l’OTS se distingua par un syncrétisme forcené créateur de confusion et des tendances mortifères particulièrement prononcées ; mais globalement l’Ordre du Temple Solaire s’inscrit dans la lignée de ces prédécesseurs que sont l’AMORC, l’ORT, l’OSTS, et tous les autres groupuscules ésotériques nés de ces structures. Au terme de cette longue étude, nous sommes donc obligés d’admettre que Traditionnellement parlant, le corpus doctrinal de l’OTS est bien en apparence celui d’une école authentiquement initiatique. Mais les folles dérives humaines et théologiques de l’OTS sont venues polluer le Message et détruire l’opérativité des enseignements et des rituels. Et la véritable question est là : Pourquoi, parmi toutes les structures ésotériques qui ont existé dans la seconde partie du XXème siècle, c’est l’OTS qui a sombré dans les abîmes de l’horreur ?

Il est difficile de répondre catégoriquement à cette lancinante question, mais quelques pistes peuvent être avancées. Tout d’abord, il est évident que la réunion de personnalités particulièrement tourmentées comme celles de Di Mambro, de Jouret et de Pillet (pour ne citer qu’eux), avec de réelles affinités entre elles par ailleurs, au sein d’une structure confidentielle comme un Ordre néo-templier, a constitué un facteur aggravant dans la psychose qui est progressivement montée en puissance dans l’OTS à partir de 1990. D’autre part, on ne peut être que frappé par l’incohérence des dirigeants et des théoriciens de l’OTS, qui ont proposé à leurs adeptes une lecture purement littéraliste d’une doctrine purement ésotérique.

C’est cette schizophrénie initiatique qui a par exemple conduit à confondre la haute notion ésotérique de retour avec celle, plus périlleuse, de Transit. (…) Mais bien plus que le littéralisme délirant, le syncrétisme forcené ou les pathologies des uns et des autres, c’est le péché d’orgueil qui a tué dans l’OTS. Toutes les écoles initiatiques – et tout particulièrement les ordres néo-templiers et rosicruciens - enseignent que l’Homme sera vraiment Réalisé, lorsqu’il aura anéanti sa volonté propre et domestiqué son ego. Or, force est de constater que l’ego des hauts adeptes de l’OTS s’est considérablement développé au cours de leur quête initiatique… »

  La confusion générée par des hypothèses fantaisistes avancées pour expliquer le drame a entraîné une absence d’analyse distante des causes possibles par les ordres initiatiques européens, analyse nécessaire pour comprendre les dysfonctionnements et les déficits de la scène initiatique européenne. Cette étude est donc à lire car les mèmes, à l’œuvre dans le drame de l’OTS, sont toujours vivants, à la recherche de terrains où se répliquer. AEIMR, BP 70733, 57207 Sarreguemines cedex, France.

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