préface de Nicole Maymat, lecture de François Bregiroux, Editions Dervy.
Livre d’art. Livre de méditation. C’est une merveille que nous a offert Jean-Luc Leguay en enluminant le texte célèbre de Dante après nous avoir enchantés avec Perceval le gallois et Le Livre de l’Apocalypse.

Dans sa préface, Nicole Maymat rend compte de la démarche ;
« A partir de trois axes de réflexion, Lire, Voir, Être, l’auteur s’attache à suivre Dante « sur ce chemin intérieur » qui mène vers la Paix et qui laisse entrevoir « au milieu du chemin de notre vie » l’Amour créateur du mouvement « qui meut l’homme, le soleil et les étoiles ». C’est « vers cette libération qu’avance le héros mystique et François Bregiroux décrypte heureusement les « étapes » de ce long et périlleux voyage. Mieux, il semble cheminer en même temps que Dante. »
Un double voyage initiatique nous est proposé, celui du texte, à la fois connu et insaisissable, celui des enluminures qui appelle à la contemplation. Et ce dernier est un chemin de Beauté et de Lumière. Même les scènes infernales recèlent une beauté secrète, annoncée. Rien ne saurait effacer le divin. La symbolique des enluminures est moins celle de l’intellect que celle issue de l’imaginal. La puissance des images naît d’un processus alchimique de précipitation dans la conscience du contemplatif des idées dantesques, depuis l’imaginal. Ce n’est qu’après que le texte vient « dire ».
Les adeptes du 515 sauront lire « à plus hault sens », selon l’incitation rabelaisienne, rappelée par François Bregiroux. Cela ne saurait se réaliser si l’on ne sait « voir » :
« L’instantanéité spatiale, la simultanéité de l’exposé visuel organise, parle, éclaire mnémotechniquement, l’art, les muses et les dieux. » suggère François Bregiroux à propos de la leçon de voir de Dante au Xe chant du purgatoire.
« Au fur et à mesure de la lecture, les réminiscences se pressent. (…) Au lecteur donc, de participer activement en retrouvant lui-même l’identité de l’ange, celle de Marie, l’objet et la nature de cette future nativité, la condition de Marie, le cadre mytho-historique présent et l’ère qui s’inaugure ici ! L’esprit du lecteur travaille. Il fouille, rassemble, organise. Sollicité, détourné, il doit suivre. (…) Alors son intelligence imaginale se met en marche, comble les vides. Elle taille, sculpte, orne, magnifie le thème qu’on lui a donné pour magnifique. Non seulement désormais il voit mais il entend…. »
Nous sommes ainsi en présence d’une co-création implicite entre Dante, l’enlumineur (le mot indique la fonction traditionnelle) et le lecteur, dont la finalité, et l’origine, est l’Être.
Lire, Voir, Être. S’affranchir du passé et du futur pour célébrer l’unique Présence de l’instant. La queste dantesque est une axialité. Les périphéries indiquent le centre et le voyage se déroule de centre en centre malgré les apparences agitées. C’est donc un voyage immobile. « L’être est, le non-être n’est pas. » rappelle Heidegger. Le lecteur ne cesse de laisser venir à lui le point sublime où la totalité se rassemble, y compris par le contre-sens.
« Si Dante n’est pas Jean, nous dit encore François Bregiroux dans sa lecture souvent déterminante, si l’unité illuminative ultime n’est pas de l’ordre de la théophanie, qu’en est-il ? Nous avons vu un point condenser le poids de la terre, un point contracter Dieu en son essence de feu. La pupille de notre œil ne peut-elle pas refléter le ciel et la terre ? De Dieu et de l’Homme, ne peut-on pas penser que le cœur, et dans le cœur l’œil du cœur… et dans cet œil, le point le plus secret ne peut-il pas, invisible lui-même embrasser et contenir toute l’immensité divine de son Être, de son œuvre et de sa loi, la loi que voile son nom ? »
Ecoutons encore une fois Béatrice :
« Je vais te dire
ce que tu veux entendre,
sans te le demander, parce que je l’ai vu
où viennent aboutir l’espace et le temps.
Non point pour acquérir un bien qui lui appartienne,
ce qui ne se peut pas,
mais pour que sa splendeur pût, en resplendissant,
dire : « J’existe »,
dans son éternité, hors du temps,
hors de tout espace, comme il lui plut,
l’Amour éternel s’épancha en neuf amours. »

En naviguant sur le fleuve de la Divine Comédie, nous devons nous rappeler que la fonction des Prophètes n’est pas d’annoncer l’avenir mais de présenter le Plan divin auquel l’initié peut se conformer pour réintégrer la place qui est la sienne au cœur du Divin.

Editions Dervy
19 rue Saint-Séverin, 75005 Paris, France.
https://www.dervy-medicis.com/

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